Miroir

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On dirait que leurs mains, quand arrivent les ténèbres, cherchent l’heure des hiboux
que les corbeaux du désert –ils s’en vantent- vont se précipiter sur la chair de la terre
on dirait que la pluie fait verser une larme, chaque soir, aux nuages d’un jour déserté par les plantes…
Mais toi tu vois les brises, à l’effleur de la vasque, la polir, en chasser les brins flottants
n’y plus laisser qu’une gazelle qui se penche, comme une belle se regarde à son miroir
ou ces coursiers ramant de leurs jambes qu’immobilise le trop de mouvement
on le croirait jardin sous cette vague, ou bien souffleurs de ces roseaux
Saharas où le gazouillis des martinets célébrât le chancellement de nos ivresses…

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Ibn Al Mutazz (861-908), Unziltu min laylin
[Traduit par Jacques Berque]
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