J'ai eu la chance de rencontrer le désert, ce filtre, ce révélateur. Il m'a façonné, appris l'existence. Il est beau, ne ment pas, il est propre. C'est pourquoi il faut l'aborder avec respect. Il est le sel de la Terre et la démonstration de ce qu'ont pu être la naissance et la pureté de l'homme lorsque celui-ci fit se premiers pas d'Homo erectus. On n'entre pas au désert avec le goût du Chaos. Le Sahara est actuellement fragilisé, or il doit rester un diocèse, d'autant plus que la religion est une clef de voûte du peuple saharien. Il est des actes qu'un homme ne commettra jamais dans une église, une synagogue ou un temple. Ici le mot “élevé” prend son sens d'élévation. Le Sahara est un temple, l'un des milieux les plus autonomes que l'on puisse imaginer, car le phénomène de l'aridité y est très spécial. Il faut donc, si l'on va au désert, en respecter les habitants, les animaux, en écouter les leçons, dont la pure simplification de la vie, alors que les mégapoles nous submergent de superflu dans tous les domaines.


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Il faut aux vigilants et “dynamiseurs” éveiller l'homme, le remettre dans l'axe d'une transcendance, d'une évolution, d'un dépouillement afin qu'il dégage son essence. Car il n'y a pas que de faux prophètes, ceux, nous dit saint Matthieu, “qui viennent à vous déguisés en brebis, mais au-dedans sont des loups voraces”. Et il conclut par : “C'est à leurs fruits que vous les reconnaîtrez.” Le citadin doit garder sa liberté intérieure. Sa vie ne s'arrête pas au point Z, ses tâches ne sont pas préétablies. À penser ainsi, il perd beaucoup de son goût de vivre, de sa curiosité. Sa marche, plutôt que sa course, doit se composer d'essor en avant et vers le haut.


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Contre la religion du profit, nous devons opposer la religion de la beauté, son pain vivant, son eau vive. Le sacré est la colonne vertébrale de l'être. Notre civilisation occidentale souffre aussi de logorrhée. Le silence, les silences sont enrichissants. Je l'ai appris au contact d'un peuple de culture orale, pour qui la phrase, le poème, le conte, la légende sont des repères de mémoire à caractère sacré. Le brouillard de nos mots nous accable. Les gens ne conversent plus. Ils lancent leurs opinions qui rebondissent sur autrui ou fuient en parallèles. Rares sont les paroles de réconciliation, d'entente. Le bavardage se répand. Prenez un mot : le temps. Si le citadin en parle, c'est pour remplir le vide de son temps. Pour le paysan ou le Bédouin ce temps est utile, nécessaire, il guide sa vie, ses récoltes. Le silence oppresse le citadin qui le noie dans les mots. Le temps, le climat, pour l'homme du désert, participent de son être. Il lui doit sa survie. Le nomade est intégré au cosmos.
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