Fruit



tu meurs
mais je t’ac-
compagne dans cette poussière où tu rampes
nous n’atteindrons pas
au fruit que nos regards font éclater
nous tomberons au pied de
l’arbre
 nous nous donnerons
puisque rien ne nous sera donné
tu meurs
mais je te sais pour une dépouille printanière
où le fruit grossira
à même la paume chaude
de qui te plantera au milieu des marées
nous
donnerons le fruit le plus clair du futur
puisque seuls nous rampons
vers l’arbre qui nous nie
puisque dans son écorce nous avons
découvert
 une route secrète que les branches ignorent
tu meurs
mais je
suis nu dans l’herbe vorace qui m’amenuise
et nous aiguise ensemble
nous lave de la pierre
nous rampons unanimes vers l’arbre qui vacille
pour recevoir la der-
nière goutte de ton sang noir
et donner au futur le fruit le plus
étrange
 qui parle dans la bouche
de milliers d’innocents morts dans
notre sang noir



Mohammed Khaïr-Eddine, in Soleil Arachnide (1969)

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire

Remarque : Seul un membre de ce blog est autorisé à enregistrer un commentaire.